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Gérald Thupinier : l’exploration continue

A contre-courant, la peinture de Gérald Thupinier exprime le tragique de la condition humaine. Son exposition “Du côté des mortels” est visible jusqu’au 17 mars à la Maison du Cygne de Six-Fours.

Photos et propos recueillis par Julien Talani

Élitiste ? Gérald Thupinier l’assume volontiers. “Pour moi, l’artiste est quelqu’un qui apprend, qui travaille et qui transmet”, déclare-t-il. Niçois d’origine, Gérald Thupinier a commencé tôt sa carrière d’artiste. Sans le savoir au début. Simplement pour tromper l’ennui. “Les jeudis après-midis, nous n’avions pas école, j’étais enfant unique, j’ai commencé tôt l’apprentissage de la peinture et de la création”. Puis, tout juste sorti de l’adolescence, il fallut faire un choix. “En 68, je me suis orienté vers l’enseignement”. Professeur de philosophie et d’anthropologie culturelle pour la faculté Nice Côte d’Azur, il a également enseigné aux étudiants de l’école de journalisme de Cannes. Cette carrière lui laisse du temps pour continuer son exploration artistique. Ses œuvres investissent la galerie parisienne Stadler dans les années 80. Elles feront partie de ce prestigieux catalogue durant près de quinze ans. “C’est un lieu chargé d’histoire, ouvert en 1955 au 51 rue de Seine, et qui a vu passer de grands noms. Entre autres, Delahaye, Falkenstein, Jenkins, Serpan, Dubuffet, Tàpies…”.

Inquiet mais pas amer

Même s’il continue de travailler et de produire, du côté de Draguignan où il vit désormais, le monde de l’art n’intéresse plus vraiment Gérald Thupinier. “Ce monde est devenu un parc d’attraction permanent. Chacun peut se proclamer artiste du jour au lendemain. Le tout pour des collectionneurs qui relèvent désormais davantage de l’homme d’affaires investisseur que du réel amateur d’art. C’est un modèle de plus en plus mercantile et désincarné. Sous prétexte de tout démocratiser, on crée des artistes qui savent un peu trop ce qu’ils vont faire le lendemain. Alors que l’art est une quête, un chemin, une aventure. Picasso, lorsqu’il peint “Les demoiselles d’Avignon” en 1907 ne sait pas où il va et se pense fou. L’artiste d’aujourd’hui n’est plus cet explorateur de jadis. Il répond trop bien à la demande idéologique. On donne l’illusion aux gens que créer est facile. Et c’est vrai dans tous les domaines. Il n’y a qu’à voir ce que les médias nous présentent comme philosophes contemporains. C’est vrai aussi en littérature : aujourd’hui, tous les titulaires du bac français sont de potentiels écrivains à succès. Ce nivellement par le bas me navre mais je suis davantage inquiet qu’amer”, poursuit l’artiste. “C’est aussi vrai dans le monde professionnel. Si vous regardez bien vous avez moins de métiers aujourd’hui mais de plus en plus d’emplois. Il n’y a pas la même noblesse dans un métier, que l’on apprend, que l’on pratique et que l’on transmet, que dans un emploi, qu’on se contente d’occuper”.

Peindre le tragique du monde

“Le temps où l’art témoignait du tragique de la condition humaine paraît bien lointain”, confirme à son tour Gilles Altieri, commissaire de l’exposition. “C’est tout à l’honneur de Gérald Thupinier d’enfoncer le clou de ses prédécesseurs. Défricheurs comme lui et infatigables témoins de leur temps. Comme eux, il continue, envers et contre tout, à peindre le tragique du monde”. Outre cet hommage, Gilles Altieri se souvient du passage de Gérald Thupinier par l’Hôtel des Arts de Toulon, en 2006. Une fidélité “nécessaire” là aussi pour l’artiste. Et quelque peu désuète, elle aussi, par les temps qui courent.

Gérald Thupinier, du côté des mortels
Entrée libre du 20 janvier au 17 mars 2024

Maison du Cygne, 209 Av. de la Coudoulière, 83140 Six-Fours-les-Plages
Du mardi au samedi de 9h à 12h et de 14h a 18h.
Fermé lundi et jours fériés.

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